Fondé en 1975, ce parc héberge l'une des plus fascinantes ethnies d'Afrique, les Mursi, dont les femmes à labret à plateau assurent la notoriété. Le parc couvre une superficie de 2 200 km2 surplombés au nord par les montagnes du Mago, point culminant de la région, à l'ouest par les collines de Mursi et, à l'est, par l'escarpement de Jinka. Ces sommets drainent les eaux des rivières Mago et Neri, affluents du fleuve Omo qui se jette plus au sud dans le lac Turkana et constitue la frontière méridionale du parc. Au centre, une vaste plaine couverte de savane semi-aride est soumise à un climat chaud et sec où les températures peuvent frôler les 40 °C. Sédiments et fossiles animaliers et humains, particulièrement nombreux dans la région, constituent autant d'indices susceptibles d'expliquer la formation du Rift ainsi que l'évolution des différentes formes de vie en Afrique de l'Est.

Créé pour la préservation des populations de buffles, de girafes et d'éléphants, ce territoire héberge quelque 74 espèces de mammifères et 153 d'oiseaux. La mouche tsé-tsé reste sans doute l'animal le plus redoutable que l'on est sûr de devoir affronter ! Évitez de porter du bleu et du noir en conséquence. Malgré cette diversité, les grands animaux soumis au braconnage ont vu leur nombre sensiblement décroître. Le long des rivières peuplées d'hippopotames et de crocodiles, la canopée des hauts figuiers sycomores est le territoire des singes colobes et des babouins qui rôdent à proximité des campements. Près de 314 km de pistes sillonnent le parc, permettant de traquer la faune sauvage, mais aussi d'aller à la rencontre des populations réparties sur ces terres isolées. Ces itinéraires ne sont praticables qu'en saison sèche, entre décembre et mars, puis d'août à septembre, mais même en ces périodes, une simple pluie peut compliquer l'expédition et mettre les 4 x 4 à rude épreuve.

Le territoire des Mursi. Devenu l'attraction principale des ethnies du Sud par la médiatisation dont il fait l'objet, ce peuple d'environ 7 000 âmes se répartit sur un territoire compris entre les collines Mursi et le fleuve Omo et, au nord, jusqu'aux plaines Tama classées " réserve naturelle ". De tradition nomade, les Mursi, souvent confrontés à la disette, cultivent quelques arpents de terre sur les berges limoneuses de l'Omo et complètent leur alimentation par les fruits de la chasse (souvent considérée ici comme du braconnage). La recherche de territoires fertiles et la prolifération des mouches tsé-tsé, véritable menace pour leur bétail, décident de leurs régulières migrations. Les femmes, cheveux ras, portent de larges disques aux oreilles et d'encore plus impressionnants labrets de terre cuite insérés dans leur lèvre inférieure. Le percement de la lèvre, effectué à l'aide d'une pointe rougie au feu, s'accompagne de l'ablation des incisives inférieures. Enduite de beurre pour hâter la cicatrisation et assurer l'élasticité des chairs, la lèvre va recevoir des labrets de plus en plus importants jusqu'aux plus imposants pouvant atteindre 18 cm de diamètre ! Plusieurs théories ont été échafaudées sur cette pratique aujourd'hui unique au monde (seules quelques autres ethnies africaines mais aussi amazoniennes avaient un rituel comparable). Destinée à décourager les esclavagistes ou à épargner les femmes lors des razzias, selon les uns, à repousser les mauvais esprits qui s'infiltrent par la bouche, selon les autres, il semble que pour les Mursi les labrets aient avant tout une valeur esthétique. Réservés aux femmes de caste élevée, les plateaux déterminent par leur volume la valeur de la dot exigée pour la jeune fille ainsi apprêtée. De leur côté, les hommes, parmi lesquels se trouvent les derniers guerriers nus d'Afrique, arborent des scarifications, preuves de leur courage et de leur vaillance au combat, et des peintures corporelles aux motifs purement esthétiques. Connus pour leur instinct guerrier, les Mursi sont en conflit larvé avec leurs plus proches voisins, et seuls les Surma, dont une légende rapporte leurs origines communes, sont considérés comme des cousins. Selon cette mythologie, Tumu, l'être suprême, sculpta un jour deux figurines de bois auxquelles il insuffla la vie. Après une existence paisible, les deux frères, installés sur les berges de l'Omo, décidèrent de se séparer à la suite d'un conflit concernant la propriété du bétail. L'un, resté sur la rive occidentale de l'Omo, engendra la lignée des Surma ; l'autre, qui a traversé le fleuve, est l'ancêtre des Mursi. Ces deux peuples d'origine nilotique partagent encore aujourd'hui de nombreux traits culturels. Outre le port du labret dont les Surma connaissent quelques variantes dans la forme, Surma comme Mursi pratiquent le rituel du saginé, un duel au bâton d'une rare violence.

Le territoire des Bodi. Contrairement aux Tishana, autre branche du peuple d'origine " Me'en " implantée sur l'autre rive de l'Omo au nord du territoire Dizi, les Bodi ont conservé leurs coutumes ancestrales dans lesquelles l'identité clanique joue encore un rôle primordial. Le bétail reste le pivot de la vie sociale et la " culture du corps ", marquée par des peintures décoratives et des scarifications tant chez les hommes que chez les femmes, est bien vivace. Sans doute influencées par les Surma, les femmes portent encore un petit disque de bois inséré sous la lèvre inférieure. Au nombre de 5 000 environ, les Bodi, répartis sur le cours supérieur de l'Omo au nord des Mursi, vivent isolés, pratiquant l'élevage et une agriculture itinérante. Chaque mois de juin, vient la très attendue Ka'el, cérémonie et compétition de l'homme le plus gros de chaque village Bodi. Unique en son genre, elle compare les ventres arrondis des jeunes hommes non mariés restés six mois à l'isolement ne buvant que des litres de lait et du sang chaque jour le plus vite possible pour être le plus gros et donc le plus beau. C'est déjà un gros défi car il faut boire 2 litres avant que la mixture ne coagule et certains vomissent... On imagine que ce n'est pas aisé. Ils défilent nus enduits d'argile et de cendres le jour de la cérémonie.

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